Comment fabrique-t-on des feuilles d’or?

Les feuilles d’or existent depuis l’Antiquité. Des sarcophages des pharaons aux châteaux prestigieux, sur les cadres, les meubles ou encore dans les assiettes des grands chefs, les feuilles d’or magnifient chaque objet tout en restant impalpables. A l’origine de leur extrême finesse un savoir-faire ancestral : le battage de l’or. Autrefois entièrement réalisé à la main par le batteur d’or, il s’accompagne aujourd’hui des technologies de pointe qui permettent d’optimiser les différentes étapes de ce processus long et complexe.

La forge

La première étape consiste à faire fondre l’or. Suivant l’utilisation finale des feuilles ou la couleur que l’on souhaite leur donner (jaune, gris, rose…), on mélange l’or pur à d’autres métaux dans un creuset comme l’argent, le cuivre ou le palladium. On parle alors d’alliages. Par exemple l’ajout de 20% de cuivre et 5% d’argent donnera de l’or rose, 25% d’argent de l’or vert. L’ajout d’autres métaux permet également d’améliorer la dureté de l’or, très malléable à l’état naturel.

Le creuset est ensuite chauffé à 1200°C, ce qui correspond à la température de fusion de l’or. Une fois fondu le mélange est versé dans une lingotière pour former un petit lingot de 200 à 400 g et d’environ 10 à 15 mm d’épaisseur.

Le laminage des feuilles d’or

Le lingot refroidi est ensuite démoulé puis laminé progressivement afin d’en réduire l’épaisseur. Lors de l’ébauchage, le rectangle se transforme d’abord en une bande d’or de 4 cm de large pouvant atteindre 40 m de long en fonction de la taille initiale du lingot.

Afin que le métal retrouve sa ductilité – et donc sa souplesse et son élasticité – la bande est à nouveau chauffée (450°C à 700°C en fonction des alliages) pour être ensuite encore étirée afin d’atteindre une épaisseur variable de 7 à 17 microns environ, et près de 150 m de long.

Après le laminage le ruban est découpé en feuilles carrées de 4 cm de côté (appelées quartiers). Chaque quartier est automatiquement placé entre deux feuilles d’un papier ultrafin et plus large (environ 15 cm de côté), puis superposé au précédent afin de former un petit livret (ou caucher) pouvant regrouper jusqu’à 2 000 quartiers.

Le battage des feuilles d’or

Contrairement aux idées reçues il n’y a pas un mais plusieurs battages successifs avant d’obtenir des feuilles d’or. A l’origine, les batteurs d’or utilisaient jusqu’à 5 marteaux de taille et de poids différents. Aujourd’hui ces opérations sont effectuées par des marteaux mécaniques pilotés par ordinateurs. Plus précis et permettant une épaisseur uniforme de la feuille d’or, ils peuvent être calibrés à la demande et ajustés en fonction des besoins spécifiques des clients.

• Le premier battage consiste à dégrossir les feuilles initiales. Un marteau-pilon va alors venir écraser les carrés jusqu’à 1500 fois à raison de 2 coups par seconde. L’objectif est d’étirer les feuilles d’or jusqu’à ce qu’elles atteignent les dimensions du caucher. A l’issue de cette opération, les carrés de 4 cm de côté font désormais 15 cm de côté et 1,2 micron d’épaisseur (1 micron=0,001 mm).Les quartiers obtenus sont ensuite découpés au massicot en 4 à 9 paquets afin obtenir des carrés encore plus petits de 5 cm de côté. Cette opération qui consiste également à couper les côtés inégaux, était à l’origine réalisée à la main par une ouvrière spécialisée, l’apprêteuse.Les feuilles d’or sont ensuite séparées des papiers pour être placées entre de nouvelles feuilles plastiques intercalaires de 12 cm à 14 cm de côté et forment un nouveau tas, la moule.
• Le deuxième battage, moins fort, va permettre d’étirer à nouveau les feuilles d’or jusqu’à 12 cm ou 14 cm de côté. Ce processus, plus lent, doit aussi être très précis afin de conserver l’intégrité de la feuille d’or qui ne mesure plus que 0,2 micron d’épaisseur à la fin !

Le vidage des feuilles d’or (et la découpe, optionnelle)

Cette opération, toujours réalisée à la main, n’a pas beaucoup changé depuis des siècles. Elle est réalisée par une ouvrière, la videuse. C’est elle qui va trier les feuilles d’or une à une et vérifier qu’elles ne présentent aucun défaut. Chaque feuille est retirée puis recoupée à l’aide d’un couteau spécial à double lame sous forme d’un carré. La taille du carré varie en fonction des besoins (de 8 cm de côté à presque 10 cm). Les chutes sont évidemment conservées et peuvent ensuite être réutilisées (sous forme de paillettes ou de poudre par exemple).

Les feuilles d’or sont ensuite déposées, toujours une par une, entre les pages en papier de soie d’un carnet avec des pinces en roseau lisse pour ne pas les abîmer. Chaque livret ainsi formé compte en général 25 feuilles d’or.

A la fois malléable et résistant, l’or est un matériau unique qui permet la fabrication de 8 000 à 10 000 feuilles d’or à partir d’un seul millimètre de ce métal précieux ! Utilisée en restauration et conservation du patrimoine, la feuille d’or reste encore aujourd’hui plébiscitée par de nombreux artistes et artisans. Disponible dans de nombreuses tailles, épaisseurs et coloris, elle apporte une touche de luxe et un éclat particulier à toutes les créations. Des atouts uniques qui lui ont permis de conquérir de nouveaux marchés tels que la gastronomie et la cosmétique de luxe.